01-06-2025
Interviews

Bart Willems, Directeur Général Groupe OMOA / « Notre objectif est de contribuer à la création d’un écosystème local de compétences… »

De la Belgique à la Côte d’Ivoire, en passant par l’univers du chocolat et de l’investissement, Bart Willems trace un parcours singulier, riche de contrastes et d’expériences. Installé en Afrique de l’Ouest depuis 1999, il dirige aujourd’hui le groupe OMOA, acteur majeur des paiements électroniques en Afrique, implanté dans plus de dix pays. Entre déploiement et maintenance de guichets automatiques et logiciels, personnalisation de cartes et digitalisation des transactions, le groupe qu’il pilote façonne chaque jour l’avenir de la FinTech sur le continent. Mais derrière cette success story, les défis restent nombreux : pénurie de talents, formation continue, fidélisation des compétences… Avec une stratégie audacieuse mêlant centres de compétences, alliances internationales et politique RH centrée sur l’humain, Bart Willems relève le défi. Dans cet entretien, il revient sur les coulisses d’un leadership exigeant, exprime sa foi en l’innovation africaine, et affirme une conviction forte : « L’Afrique doit croire en elle-même et en ses talents ». Une immersion au cœur d’un projet entrepreneurial où ambition rime avec transformation continentale.

Parlez-nous de vos défis du recrutement et de la formation

Comme beaucoup d’acteurs du secteur FinTech, OMOA est confronté à des défis majeurs en matière de recrutement et de formation. Notre croissance rapide, conjuguée à une réorganisation de certains services et départements, rend la recherche de profils qualifiés plus complexe — notamment dans les fonctions support comme les achats ou le pilotage de projets (PMO).

OMOA intervient sur l’ensemble de la chaîne de valeur des paiements électroniques. Nous sommes actifs dans la gestion et la maintenance des guichets automatiques (GAB/DAB), la personnalisation des cartes ainsi que dans le traitement digital des transactions à travers notre centre OPS au Togo. Le groupe est présent dans une dizaine de pays d’Afrique, dont la Côte d’Ivoire, le Togo, le Bénin, le Burkina Faso, le Niger, ou encore le Cameroun, le Tchad, la Guinée équatorial, la RCA, le Congo et la RDC avec un holding historiquement basé au Luxembourg. Dans notre région aujourd’hui il y a un parc de près de 6,000 machines GAB/DAB, dont 60% sont de marque NCR, que nous représentons dans la région. Plus de la moitié de ces équipements, soit environ 3,000 unités, sont sous notre maintenance, ce qui fait de nous un acteur leader en Afrique subsaharienne.

Notre secteur est en constante évolution — tant au niveau régional que mondial — avec des avancées rapides, notamment en intelligence artificielle. Cela exige des profils variés : des techniciens en informatique, électronique ou électromécanique pour la maintenance ; des ingénieurs spécialisés en génie logiciel, développement ou informatique pour le traitement des données et la gestion des cartes. L’un des obstacles majeurs reste le manque de filières spécialisées dans nos domaines (GAB, DAB, traitement de transaction). Pour y répondre, nous avons développé une stratégie proactive de recrutement à la source, en partenariat avec des écoles et universités. Nous intégrons les jeunes diplômés comme stagiaires ou cadets, et assurons leur formation en interne. Nous savons que 30 à 50 % d’entre eux quitteront l’entreprise dans un délai de 12 à 24 mois, mais nous assumons cette réalité : c’est une forme de contribution au développement des compétences africaines dans le secteur. Même lorsqu’ils nous quittent pour d’autres entreprises, en Afrique ou à l’étranger (Canada, États-Unis…), ces collaborateurs deviennent souvent des relais d’image et de compétence, notamment lorsqu’ils rejoignent nos clients bancaires.

Enfin, en tant que leader sur un marché hautement sensible — celui des paiements physiques et digitaux — nous avons une obligation de fiabilité et de sécurité. Cela nous pousse à investir massivement dans la formation continue afin de garantir que nos équipes soient parmi les plus compétentes et certifiées du secteur. C’est ainsi que nous consolidons notre leadership tout en préparant l’avenir du métier en Afrique.

Face aux défis liés à la formation et à la rétention des talents, y a-t-il des initiatives que vous avez mis en place pour y faire face ?

Chez OMOA, nous avons mis en œuvre plusieurs initiatives stratégiques pour faire face à ces enjeux, tout en consolidant notre position de leader dans le secteur. Nous investissons fortement dans la formation continue de nos équipes à travers deux centres de compétences : l’un basé à Abidjan pour l’Afrique de l’Ouest, l’autre à Douala pour l’Afrique centrale. Ces centres jouent un rôle clé dans le développement des savoir-faire techniques et des compétences managériales. Notre partenariat avec NCR, dont nous sommes partenaire Platinum, nous engage à respecter des standards internationaux élevés. Cela nous donne accès à des formations de pointe, mais aussi à des exigences fortes en termes de certification et de mise à niveau continue. Nos collaborateurs seniors participent régulièrement à des sessions au centre de formation NCR de Dubaï et, à leur retour, transmettent leur expertise à travers notre programme interne OMOA Academia, en formant leurs collègues en Afrique francophone.

En parallèle, nous utilisons la plateforme en ligne NCR University, qui permet à nos techniciens et ingénieurs de se certifier régulièrement. Aujourd’hui, 100% de nos techniciens sont certifiés NCR, garantissant ainsi un haut niveau de qualité et de fiabilité dans nos interventions. Notre filiale de Lomé, spécialisée dans la personnalisation de cartes et le traitement digital, est également certifiée PCI (Payment Card Industry), une norme exigeante qui nous impose une mise à jour permanente de nos compétences, notamment en cybersécurité.

Nous avons aussi adopté une approche lucide face à la fuite des talents, une réalité dans notre secteur. D’un côté, nous proposons des rémunérations compétitives, souvent supérieures à celles des banques, et un environnement B2B exigeant mais formateur. De l’autre, nous savons que certains jeunes collaborateurs partiront après deux à trois ans — et nous l’assumons. Pour nous, former des talents qui deviendront des ambassadeurs d’OMOA dans d’autres structures ou chez nos clients fait partie de notre contribution au développement du secteur en Afrique. D’ailleurs, il n’est pas rare que ces anciens reviennent, enrichis de nouvelles expériences.

Un autre enjeu auquel nous faisons face est la perception du marché, notamment en matière de prix. En Afrique, les discussions commerciales commencent souvent par une négociation tarifaire. Or, nous affirmons clairement que la qualité a un prix. Comme je le dis souvent : « Une Mercedes n’est pas une Dacia. » Nos tarifs reflètent non seulement la robustesse de nos solutions, mais aussi les investissements que nous réalisons en formation, sécurité et certification. Cette approche nous permet de valoriser notre positionnement, de démontrer notre sérieux, et de convaincre nos clients de miser sur des solutions fiables et durables. Dans un environnement où les risques de fraude et de cyberattaques sont croissants, notre rigueur et notre capacité d’anticipation sont des atouts reconnus.

Enfin, nous croyons fermement que l’Afrique dispose des talents nécessaires pour répondre à ses propres besoins. C’est pourquoi nous œuvrons à bâtir un écosystème local de compétences, en formant d’abord à des métiers de base, puis en spécialisant nos collaborateurs à travers des parcours ciblés. Cette stratégie nous permet de développer une expertise locale forte, capable de s’adapter à l’évolution rapide des technologies et des attentes du marché. Notre approche repose sur un équilibre entre excellence opérationnelle, investissement humain et compétitivité, avec un objectif clair : former, fidéliser, et faire rayonner les talents africains au service d’un secteur en pleine transformation.

Au-delà des salaires attrayants qui peuvent retenir vos talents, parlez-nous de votre politique sociale…

Chez OMOA, nous avons développé une politique sociale forte, fondée sur la proximité, la confiance et l’engagement. Avec environ 200 collaborateurs, nous restons une entreprise à taille humaine, où l’esprit familial et la cohésion d’équipe sont au cœur de notre culture. Je considère personnellement OMOA comme une grande famille.

Nous faisons le choix de la flexibilité : les horaires de travail ne sont pas rigides, car nous avons confiance en nos équipes. Nous recrutons non seulement des profils qualifiés, mais aussi des femmes et des hommes qui partagent nos valeurs : l'excellence, le service, la passion, le respect, l'intégrité et le talent.

La passion, justement, est un critère essentiel pour nous. Nous recherchons des collaborateurs engagés, curieux, animés par le désir d’apprendre et de progresser. Quand de jeunes diplômés rejoignent nos rangs, ils arrivent souvent avec une énergie débordante et une ambition saine que j’encourage pleinement. Cette passion est le moteur de l’excellence, une valeur centrale chez OMOA.

Notre secteur est hautement concurrentiel, que ce soit dans les domaines des GAB/DAB, des cartes bancaires ou du processing. Pour rester à la pointe, nous misons sur trois piliers : l’excellence technique, la passion du métier et un service client irréprochable. C’est pourquoi nous attendons de nos collaborateurs plus qu’une maîtrise technique. Nous recherchons des profils avec une vraie sensibilité commerciale, capables de comprendre les besoins des clients, de les anticiper et de s’adapter pour dépasser leurs attentes. La satisfaction client n’est pas un objectif parmi d’autres : c’est notre priorité absolue. Cette exigence suppose aussi un haut niveau d’implication. Dans certains cas, cela signifie intervenir rapidement, même en dehors des heures classiques, lorsqu’un incident survient. Cette réactivité, ce sens du dépassement de soi, c’est ce qui fait la différence entre OMOA et d’autres acteurs du marché.

Quelle place occupent les thèmes de la diversité et de l’inclusion dans votre stratégie de gestion des talents ?

La diversité et l’inclusion sont des réalités vécues au quotidien chez OMOA. Présents dans une dizaine de pays africains, nous bénéficions naturellement d’une grande richesse en termes de profils, d’expériences, de cultures et de nationalités. À titre d’exemple, dans notre centre de processing à Lomé (OPS), bien que la majorité des collaborateurs soient togolais, nous comptons six ou sept nationalités différentes.

Nous adoptons une approche résolument ouverte : nous recrutons les compétences là où elles se trouvent, sans barrière géographique ni culturelle. Bien entendu, des différences culturelles peuvent parfois entraîner des malentendus, mais ils sont toujours gérés avec intelligence et bienveillance. Cette diversité est une force que nous valorisons pleinement. Cela dit, certains métiers techniques — notamment les fonctions d’ingénierie impliquant des interventions sur site à des horaires décalés — restent aujourd’hui moins accessibles aux femmes, ce qui explique une certaine sous-représentation dans ces domaines. En revanche, dans d’autres départements comme le processing ou les fonctions support, la parité progresse, et nous travaillons activement à la renforcer.

L’arrivée de notre nouvel actionnaire, SPE Capital, a renforcé cette dynamique. Nous avons mis en place des indicateurs précis pour suivre nos progrès en matière de diversité et d’inclusion, notamment sur la représentation des femmes dans l’ensemble de nos équipes. Nous ne pratiquons pas une discrimination positive systématique : la compétence reste notre critère premier. Mais lorsque des profils féminins qualifiés se présentent, nous les considérons comme une richesse supplémentaire. Notre ambition est d’atteindre un équilibre réel et durable, à tous les niveaux de l’entreprise.

Vous êtes implanté en Afrique depuis un certain temps. Quelles solutions à long terme envisagez-vous pour renforcer le vivier de talents dans le secteur des fintechs ?

Il me semble essentiel d’adopter une vision globale et systémique. Pour renforcer durablement le vivier de talents dans le secteur des fintechs, il faut considérer l’ensemble de l’écosystème, depuis les établissements de formation jusqu’aux entreprises.

Aujourd’hui, les écoles jouent un rôle important, et dans l’ensemble, elles délivrent un travail de qualité. À Lomé, au sein de notre centre de traitement OPS, nous avons noué des partenariats stratégiques avec des institutions telles que l’Institut Africain de l’Informatique (IAI) ou l’Université de Togo. Ces collaborations permettent de rapprocher efficacement les mondes académique et professionnel. Nos deux directrices, de OPS et notre DRH Groupe, rédigent chaque année un rapport détaillé, qui met en lumière les points forts des formations, mais aussi les axes d’amélioration, en lien avec les réalités terrain. Ce dialogue entre écoles et entreprises est, à mon sens, essentiel. Il permet d’ajuster les cursus aux besoins réels du marché, d’éviter les écarts entre les compétences acquises et celles attendues, et de mieux préparer les jeunes à leur insertion professionnelle.

Par ailleurs, en Afrique, de nombreux jeunes font preuve d’une grande autonomie. Ils s’orientent spontanément vers des formations en ligne ou certifiantes proposées par des institutions externes, et nous les soutenons dans cette démarche en investissant activement dans leur développement. C’est aussi dans cette optique que nous encourageons nos équipes à se former via des plateformes telles que NCR University, qui propose un accès permanent à des contenus spécialisés dans nos métiers. Sur le long terme, je suis confiant. Nous constatons déjà une nette amélioration du niveau général, tant sur le plan technique que comportemental. Et c’est fondamental, car notre secteur — la monétique, la gestion des flux financiers et des données sensibles — repose avant tout sur l’intégrité et la confiance. En 25 ans, nous n’avons heureusement jamais connu d’incident majeur sur ce plan.

Pour continuer à progresser, il est impératif de renforcer les passerelles entre le monde académique et les entreprises. Ces synergies sont un levier puissant pour structurer et faire émerger un véritable réservoir de compétences locales, capable de répondre aux enjeux de l’innovation financière en Afrique.

Quelles sont les compétences techniques et comportementales les plus difficiles à trouver sur le marché actuellement ?

Dans notre secteur, une conviction forte guide notre approche : chaque collaborateur, quel que soit son poste, est aussi un ambassadeur commercial. Chacun contribue, directement ou indirectement, à la promotion et à la satisfaction autour de nos produits et services. Cela représente parfois un véritable défi, notamment pour les profils techniques comme les ingénieurs, qui ont souvent une approche rigoureuse et méthodique, parfois moins orientée vers la communication ou la flexibilité commerciale. Trouver l’équilibre entre expertise technique et posture client est devenu une priorité.

Nos ingénieurs terrain, en charge de la maintenance ou des interventions préventives, sont très souvent les premiers interlocuteurs de nos clients. Leur comportement, leur écoute et leur réactivité influencent directement la perception globale de notre entreprise. Un retard ou un incident mal géré sur le terrain peut impacter la relation commerciale, voire la confiance. C’est pourquoi nous insistons sur une culture commune : la satisfaction client est l’affaire de tous !

Autre point sensible : la communication interne. Lors du lancement d’un nouveau produit ou d’une évolution de notre offre, l’information circule rapidement côté commercial, mais pas toujours de façon fluide vers les équipes techniques. Or, ce sont souvent ces dernières qui sont en première ligne. Il est donc essentiel qu’elles soient aussi bien informées et préparées que les équipes de vente. Pour répondre à ces enjeux, nous avons mis en place plusieurs initiatives à travers notre programme OMOA Academia. Nous y proposons des modules de formation qui ne se limitent pas à la technique, mais intègrent aussi des compétences transversales : gestion de projet, communication, finance, logistique, ressources humaines… Par exemple, nous formons nos commerciaux à la compréhension des coûts réels des ventes, pour leur permettre de mieux gérer les marges et d’adopter une approche plus stratégique.

Nous avons également structuré un PMO interne et développé une véritable culture projet. Aujourd’hui, nous menons des centaines de projets en parallèle, qu’ils soient techniques, opérationnels ou stratégiques. Cette organisation permet à chacun de monter en compétences dans des environnements complexes et transverses, en lien direct avec les objectifs globaux du groupe.

Cybersécurité, intelligence artificielle et gestion de projets : quelle place dans la stratégie de développement d’OMOA ?

Ces trois thématiques — intelligence artificielle, cybersécurité et gestion de projets — sont désormais au cœur de notre réflexion stratégique chez OMOA.

L’intelligence artificielle commence à émerger en Afrique, et nous explorons activement ses potentialités. Elle représente pour nous un double levier : d’une part, pour améliorer nos processus internes (efficacité opérationnelle, automatisation, prédiction des incidents) ; d’autre part, pour enrichir notre offre client, en imaginant de nouveaux services à valeur ajoutée. Nous nous posons les bonnes questions : comment exploiter la data dont nous disposons ? Quels cas d’usage concrets développer ? Et comment faire évoluer nos métiers en intégrant l’IA de manière responsable et durable ?

L’analyse de données reste encore peu développée sur le continent. Pour illustrer, je repense à mon expérience en Europe : après un achat ciblé en grande surface, je recevais dès le lendemain des promotions personnalisées sur des produits complémentaires. Ce type de logique prédictive est encore très rare en Afrique. Pourtant, les banques et les acteurs de la fintech pourraient en tirer un énorme potentiel, à condition de mieux connaître leurs clients et de traiter intelligemment les données disponibles. À l’avenir, l’IA jouera sans aucun doute un rôle clé dans la transformation du secteur.

Concernant la cybersécurité, c’est un enjeu mondial, qui nous concerne directement. Les menaces ne connaissent pas de frontières : elles peuvent venir de n’importe où — du Pakistan, du Venezuela ou d’ailleurs. Chez OMOA, nous avons fait le choix d’investir massivement dans la prévention, la formation et la vigilance continue. Les cyberattaques évoluent chaque jour ; notre capacité à les anticiper dépend d’une veille active, de solutions technologiques adaptées et d’une culture de la sécurité partagée par tous. Jusqu’à présent, nous avons été épargnés par des incidents majeurs, mais nous restons en alerte permanente. La sécurité est un pilier essentiel, non seulement pour nous, mais aussi pour nos clients — en particulier dans un secteur comme le nôtre, lié aux flux financiers et aux données sensibles.

Recrutement et marque employeur : quels sont les défis et initiatives d’OMOA ?

Chez OMOA, nous mettons un point d’honneur à offrir un environnement de travail chaleureux, flexible et humain, ce qui est très apprécié par les candidats et les collaborateurs. Nous cultivons une ambiance familiale et ouverte, loin des cadres rigides et hiérarchiques. Cette flexibilité s’exprime notamment par notre capacité à accompagner les réalités personnelles de nos employés, en particulier les femmes. Si un enfant tombe malade ou qu’une urgence survient, il est tout à fait possible de s’absenter. En retour, nous attendons autonomie et sens des responsabilités : tant que le travail est fait, la confiance est totale.

L’un de nos défis reste toutefois la visibilité de la marque OMOA. En tant qu’entreprise B2B, nous sommes moins connus du grand public que des groupes bancaires comme Ecobank ou Société Générale. Cela peut influencer la perception initiale des candidats. Néanmoins, nous avons mis en place une stratégie de recrutement structurée, avec des objectifs clairs en matière d’attractivité, de satisfaction et de rétention des talents, qu’il s’agisse de jeunes diplômés, de profils expérimentés ou de stagiaires à potentiel.

Notre rémunération est compétitive sur le marché. Toutefois, certains candidats font le choix de partir à l’international — vers le Canada, l’Europe ou les États-Unis — où les services sont souvent plus développés et les perspectives de carrière perçues comme plus larges. Ces départs sont compréhensibles, souvent liés à des projets familiaux ou des opportunités personnelles. Moi-même, j’ai quitté mon pays d’origine pour explorer de nouveaux horizons, je respecte donc ces choix.

Malgré tout, notre turnover reste contenu et maîtrisé. Pourquoi ? Parce que nous offrons bien plus qu’un emploi : des formations de haut niveau, des parcours d’évolution stimulants, et des partenariats solides avec des acteurs de référence, comme NCR et Thales, 2 leaders mondiaux dans leurs secteurs respectifs. En adoptant des standards internationaux exigeants, notamment les certifications PCI en matière de sécurité, nous avons su construire une réputation solide et un environnement de travail qui valorise l’excellence. Nos collaborateurs savent qu’ils évoluent au sein d’une entreprise respectée, exigeante, mais aussi porteuse de sens. Et c’est cette excellence partagée qui crée l’engagement durable et la fidélité des équipes.

Quelle serait, selon vous, la mesure prioritaire pour renforcer la qualité du capital humain chez OMOA dans les 2 à 3 années à venir ?

Selon moi, la priorité pour les 2 à 3 années à venir est claire : mieux structurer et formaliser les parcours de carrière au sein de l’entreprise. En tant que Directeur Général, je considère que cette démarche est essentielle pour renforcer l’engagement, la visibilité des perspectives d’évolution, et donc la rétention des talents.

Nous avons déjà entamé ce travail dans certaines directions, notamment techniques. Par exemple, dans le cadre de notre activité GAB/DAB, nous avons mis en place un système de classification interne allant de stagiaire à cadet, jusqu’au niveau de senior expert, que l’on atteint généralement après 12 ans d’expérience. Ce système est structurant, mais il mérite d’être mieux défini, clarifié et enrichi. Chaque niveau devrait être associé à des compétences clairement identifiées, des prérequis objectifs et des formations spécifiques permettant aux collaborateurs de se projeter dans leur évolution. Aujourd’hui, cette logique est encore partiellement appliquée, notamment dans les directions de support, où les parcours sont moins lisibles que dans les équipes d’ingénierie ou de terrain.

Nous organisons déjà des évaluations semestrielles, qui permettent d’échanger avec chaque collaborateur sur ses objectifs, ses aspirations et ses axes de progression. Mais la traduction RH formalisée de ces échanges est encore insuffisante. Il nous manque une véritable cartographie des compétences et un accompagnement structuré par palier de progression. C’est donc un chantier prioritaire que nous devons mener à bien — pour rendre plus lisible l’évolution interne, mieux valoriser les talents, et fidéliser les collaborateurs sur le long terme.

Seriez-vous ouvert à un accompagnement externe (cabinet RH, experts sectoriels, etc.) pour relever ces défis ?

Absolument. Nous avons déjà collaboré avec des consultants externes qui nous ont grandement aidés à structurer notre démarche. Leur intervention a été particulièrement bénéfique, notamment pour clarifier et formaliser notre vision, notre mission et nos valeurs. Des concepts essentiels, mais qui doivent impérativement être traduits en actions concrètes et en orientations stratégiques opérationnelles.

Nous avons consacré près de deux ans à cet exercice de fond, avec pour objectif d’aligner notre raison d’être avec le développement de nos produits et services, mais aussi avec les compétences clés à renforcer chez OMOA pour accompagner notre croissance.

Aujourd’hui, nous sommes pleinement entrés dans une phase d’exécution. Cela ne signifie pas que nous agissons seuls : nous continuons à faire appel à des experts sectoriels sur certains volets spécifiques, et à des cabinets de chasse pour identifier les profils rares ou stratégiques. Nous organisons aussi des programmes de team building et d’accompagnement managérial avec des partenaires spécialisés.

Grâce à notre présence dans 12 pays et plus de 20 ans d’expérience, nous avons pris du recul pour réviser notre approche globale, notamment via l’initiative "Good to Great". Aujourd’hui, notre feuille de route est claire, avec des objectifs mesurables à horizon 2029. Nous restons donc ouverts à tout accompagnement externe susceptible d’enrichir notre trajectoire et de renforcer notre capital humain.


Votre mot de fin...

Je crois profondément en l’Afrique. Mais pour que le continent réalise pleinement son potentiel, il est essentiel que les Africains croient aussi en eux-mêmes. Trop souvent, la première réponse à un défi est d’aller chercher ailleurs. Pourtant, les solutions existent ici, portées par des talents locaux et des entreprises engagées, comme OMOA. Nous devons apprendre à miser sur la qualité, même si elle a un coût. Dans un secteur aussi stratégique, sensible et réglementé que celui des paiements, la sécurité ne peut jamais être compromise. Une faille peut coûter très cher. Voilà pourquoi notre priorité doit être de construire des solutions robustes, fiables et africaines.

Des choses exceptionnelles se font déjà sur ce continent. Il est temps de leur donner toute leur place. Merci.