15-11-2025
Actualités

Capital humain et développement local

Le défi des villes secondaires ivoiriennes

Bouaké, Daloa, Korhogo et San Pedro. Quatre noms, quatre bassins d’emploi emblématiques d’une Côte d’Ivoire qui se cherche un équilibre entre croissance économique, emploi local et valorisation du capital humain. Selon une récente étude menée par le Centre de Recherches Microéconomiques du Développement (CREMIDE) de l’Université Felix Houphouët-Boigny d’Abidjan avec l’appui de l’Agence Française de Développement (AFD), ces villes secondaires incarnent à la fois le potentiel et les paradoxes du développement territorial ivoirien. L’objectif de cette étude était d’établir un diagnostic des compétences dans ces quatre villes secondaires du pays, évaluer leur adéquation avec les offres locales d’emploi afin de formuler des recommandations pour favoriser l’insertion des jeunes et accroître l’attractivité de ces villes.

Alors qu’Abidjan concentre près de 90 % des entreprises formelles du pays, la vitalité économique des autres pôles urbains reste freinée par une inadéquation persistante entre les compétences disponibles et les besoins du marché du travail. Le constat est sans appel : malgré une démographie dynamique, le niveau de qualification du capital humain reste faible, et le secteur informel domine largement les activités économiques locales.

L’étude, fondée sur des données du CREMIDE et de l’Institut National de la Statistique et provenant à la fois des enquêtes emploi disponibles depuis 1993 et d’enquêtes de terrain menées entre 2021 et 2025, dresse un diagnostic précis des quatre villes. Bouaké, ancienne capitale de la rébellion, peine à reconquérir son attractivité malgré des infrastructures solides. Daloa séduit par son accessibilité et sa position stratégique, tandis que Korhogo tire parti de son dynamisme culturel et de son tissu social pour émerger comme un pôle d’équilibre au nord du pays. San Pedro, moteur portuaire du sud-ouest, affiche un potentiel économique certain mais souffre d’une offre de formation inadaptée et d’un tissu industriel encore fragile.

Au-delà du constat, l’étude trace des perspectives : former autrement, attirer mieux, planifier durablement. Les auteurs plaident pour un renforcement de la formation technique et professionnelle, une coopération plus étroite avec le secteur privé, et des politiques fiscales et d’infrastructures locales plus incitatives. Les villes secondaires doivent devenir des pôles d’attractivité humaine et économique, capables de retenir les jeunes talents et de déconcentrer les opportunités d’Abidjan.

En filigrane, l’étude de l’AFD rappelle une vérité essentielle : le développement local est d’abord une affaire de capital humain. Miser sur les compétences, c’est investir dans la durabilité économique et sociale du pays. Faire des villes secondaires des territoires d’opportunité, c’est bâtir les fondations d’une Côte d’Ivoire plus équilibrée, inclusive et résiliente.

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