L’apparition du
coronavirus en décembre 2019 en Chine et sa propagation vertigineuse n’épargne
aucune région de la planète.
Depuis le 11 mars
2020, date d’apparition du premier cas en Côte d’Ivoire, cette pandémie fait
planer des menaces sur notre pays, notamment sur le système sanitaire, le
système éducation/Formation et le système socio-économique avec son corolaire
de fermeture des entreprises, entraînant des mises en chômages, des
licenciements, un gel des recrutements et la précarisation des emplois.
Cette situation
inédite met les entreprises à la croisée des chemins et pose la problématique
de la capacité de résilience de celles-ci face à la Covid-19. D’où l’importance
de cet article : « LES ENTREPRISES IVOIRIENNES A L’EPREUVE DE LA
COVID-19 ».
Cette publication
est d’autant plus justifiée que Angel GURRIA, Secrétaire Général de l’OCDE
soutient : « Même, lorsque le pire de la crise sanitaire sera
derrière nous, c’est à la crise de l’emploi qui s’en suivra, que les
populations devront faire face ».
Traiter de ce sujet
amène d’abord et avant tout, à examiner les problèmes auxquels les entreprises
ivoiriennes étaient confrontées avant la covid-19 et celles auxquelles elles
sont confrontées actuellement pendant la pandémie, étant entendu que nul ne
peut prévoir ce qui pourrait se passer si la maladie perdure.
Il s’agit de prime à
bord d’explorer le champ des difficultés des entreprises avant la survenance de
la pandémie.
A ce sujet, il est
bon de rappeler que nos organisations étaient déjà éprouvées avant la crise de
la Covid-19, donc fragilisées. Les problèmes qui matérialisent ces difficultés
et cette fragilité sont de divers ordres, à savoir, les problèmes liés à
l’adéquation formation/emploi, aux malversations, à la mauvaise gouvernance, à
l’équilibre budgétaire et au manque de trésorerie, à la pression fiscale, aux
difficultés d’accès des PME aux marchés publics, à l’accès des PME aux
financements par les banques et au manque de la qualité interne des services et
prestations à la clientèle, etc.
Cette situation déjà
complexe pour les entreprises s’est exacerbée et s’est hyper- complexifiée avec
l’avènement de la pandémie à Coronavirus mettant en difficulté la plupart des
entreprises.
Ainsi, la souffrance
des entreprises se matérialise concrètement par des difficultés liées aux
ressources humaines (maladie, stress, absentéisme, double vacation, chômage
technique, licenciement, etc.), aux ressources financières (absence de revenus,
baisse de chiffre d’affaires, problème de trésorerie, etc.), aux ressources
matérielles (manque ou absence d’intrants bruts ou intermédiaires, insuffisance
des plateaux techniques, manque d’équipement, etc.), aux ralentissements ou à
l’arrêt du régime des activités (manque de contrat, absence des clients, baisse
des parts de marché, commandes annulées, paiements retardés, productions
arrêtées, événements annulés, etc.), aux dépenses imprévues ou charges hors
activités ordinaires entraînant la hausse des charges d’exploitation (masque,
gel, gants, sceaux, savon, abonnement internet à domicile pour le télétravail,
etc.)
1.
LE SECTEUR DU TRANSPORT
Dans ce secteur, la flotte aérienne de la compagnie nationale (Air Côte
d’Ivoire) est clouée au sol avec la fermeture des frontières aériennes, ce qui
déstabilise l’organisation et pèse négativement sur la trésorerie, de même que
les emplois courent un risque.
Il en va de même pour la société des transports abidjanais (SOTRA) qui
est contrainte de réduire le nombre de passagers transportés afin de respecter les
mesures barrières. Cette situation entraîne inéluctablement une baisse
drastique des recettes journalières mettant ainsi l’entreprise en difficulté.
Les autres structures de transports comme les sociétés de taxis (ARA
Transport et Yango qui sont des taxis en ligne), les sociétés de
transports interurbains (UTB, AVS, CTE, MT, Etc.),
n’en sont pas moins épargnés. Par ailleurs, le ralentissement des transports
intercommunaux (Gbaka, Taxis compteurs) et les décisions de certains Maires interdisant la
circulation des wôrô wôrô contribuent à affaiblir ces activités qui sont pour
la plupart dans l’informel.
2.
LE SECTEUR DU TOURISME ET DE L’HOTELLERIE
C’est l’un des
secteurs les plus durement touchés par la crise à cause des mesures barrières.
A cet effet, l’une des mesures fortes du Conseil National de Sécurité a consisté à la fermeture sur l’étendue du
territoire National des restaurants (Nuit de Saïgon, Paul, Parenthèse, Le Grand
Large, La Taverne Romaine, etc.), maquis et bars (Maquis forum d’Abobo, Maquis le
village, Les Maquis Bars de la Rue Princesse de Yopougon, de l’Espace Figayo,
des Cités Balnéaires de Bassam, etc.), boîtes de nuit (Café de
Versailles, Beblack Club de Angré, l’Ambassade, Rue Princesse, l’Alizé Club de
Marcory Zone 4, le Code Barre de Biétry, etc.), cinémas
et lieux de spectacles (Magestic Cinéma, Cinéma Prima Center, Palais de la
Culture, etc.).
Les hôtels (Hôtel Président, Sofitel, Le Grand Hôtel,
Pullman, Novotel, Ivotel, Résidence Bertille, Radisson Blu, etc.) et les sites
touristiques (La Basilique Notre Dame et les Lacs aux Crocodilles de Yakro, Les
Cascades et les Ponts de Liane de Man, le Musée du Costume, le Parc National de
la Marahoué, le Mont Korhogo, etc) ont, quant à eux, subi les conséquences
directes de la fermeture des frontières aériennes et terrestres, ainsi que
celles de l’isolement du grand Abidjan.
Dans le même sens, les agences de voyages ont été
collatéralement victimes de l’arrêt des activités des compagnies aériennes,
maritimes et terrestres (Mistral voyages, Ivoire voyages, Idéal voyages, Alizé
voyages, Espace voyages, Etc.).
Enfin, les activités culturelles (Festivals Culturels (FEMUA,
FESTIVAL TONKPI NIHDALEY de MAN, PÂQUINOU EN PAYS BAOULE, etc.), ont été
latéralement plombées par les mesures de prévention de la covid-19.
3.
LE SECTEUR DES BANQUES
La baisse de l’activité économique au plan national et sous
régional a eu pour conséquence le ralentissement du business au niveau des
banques. Les Opérateurs des PME/PMI, du secteur informel et même les
particuliers n’arrivent plus à alimenter suffisamment leurs comptes bancaires,
à honorer les échéances de remboursements de prêts et font de moins en moins
les opérations domestiques et étrangers. Ce qui met les banques en difficultés
dans la collecte des ressources, la gestion des ressources et la distribution
des emplois. Cela est perceptible dans les Banques commerciales (BICICI, Banque
d’Abidjan, Banque de l’Union, SIB, SGBCI, NSIA, BOA, Banque Atlantique, etc.),
les Banques d’investissement (BNI, SIRIUS Capital, BGFIBank, ECOBANK,) et les
Banques de l’habitat (BHCI).
4.
LE SECTEUR DU BTP
La fermeture d’entreprises liées au Coronavirus se multiplie
dans le BTP afin de préserver la santé des travailleurs et celle de leurs
familles respectives. On note aussi que le secteur cumule des créances d’un
montant de 22,4 milliards de F CFA. L’impact de l’arrêt de plusieurs chantiers
de construction et de travaux de routes et de voiries se fait sentir sur le CDE
(Consortium d’Entreprise), SCHOOFS CÔTE D’IVOIRE, la CICT (Compagnie Internationale
de Commerce et de Travaux), le CIP (Cabinet Immobilier et de Prestation),
SMB.T. SARL, Etc.
LE SECTEUR DES INDUSTRIES
Le secteur des
industries a connu des perturbations majeures dans la chaîne des
approvisionnements depuis le début de la crise sanitaire en Asie et en Europe.
Une étude commanditée par la Fédération Nationale des Industries et Services de
Côte d’Ivoire (FNICI) indique que :
-
L’Industrie
manufacturière et celle de production de l’énergie sont frappées par des difficultés
en approvisionnement des intrants bruts et intermédiaires qui ont entrainé une
baisse de production variant entre 15% et 18%, ce qui représente une valeur de
30 à 120 Milliards.
-
Une perte estimée
à terme à 8 semaines sur les 52 semaines de l’année pourrait coûter environ 5
points du PIB, soit en valeur nette, 1500 Milliards.
Parmi les industries en difficultés, relativement à la
Covid-19, on peut citer entre autres, les industries extractives (Barrick Gold
de Tongon, Endeavour Mining d’Agbaou et de Ity, Australien Perseus Mining de
Cissingué, de Yaouré, etc.), les industries d’exploitation pétrolière, (SIR,
IVOIRE PETROLEUM, NOPCI, PETROCI, Etc.), chimiques et caoutchouc plastiques.
Dans la même veine, on note que les industries agroalimentaires (STNC NOIX DE
CAJOU) et tabac (SITAB), les industries textiles (UNIWAX, CIDT, FILIVOIR) et de
cuir (SOCIETE IVOIRIENNE DE TANNERIE), les industries du bois (GIBT, GROUPE
TRABEX ITS, LA NOUVELLE SCIERIE D’AGNIBILEKRO SA, PAL PLUS, SAFIR, Etc.) et
meubles (CECA, DESIGN BOIS, ESPRITS MEUBLES, INTERKIT Sarl, IVOIRE MEUBLES,
Etc.), les industries du papier (ACIPAC, SIEMPA, SIPPI PAPIERS, Etc.), ne
connaissent pas une situation plus reluisante.
6.
LE SECTEUR AGRICOLE
Le secteur agricole a également connu un choc dans la chaîne
des imports/exports depuis le début des mesures barrières liées à la crise
sanitaire. Ceci a entraîné la mise en
chômage des employés, la baisse de la production et de la productivité, la
réduction des revenus et l’augmentation du taux de pauvreté. Les difficultés du secteur agricole sont
liées aux points ci-après :
-
Agriculture essentiellement manuelle et dépendante de la main-d’œuvre
humaine qui se rarifie de plus en plus
-
Difficultés de commercialisation des produits agricoles
-
Difficultés d’accès au marché urbain avec l’isolement du Grand Abidjan
-
Accès limité des intrants agricoles bruts et intermédiaires
-
Utilisation rationnelle de la main-d’œuvre limitée par les mesures
barrières
-
Baisse des exportations de 20 à 30% dans le secteur des fruits et
légumes, selon la spéculation
-
Quasi arrêt de la commercialisation dans la filière anacarde
-
Arrêt de l’exportation du café-cacao et des fonds de tasse dans la
filière hévéa
-
Forte réduction de la croissance dans le monde de l’agro-industrie.
7.
LE SECTEUR EDUCATION FORMATION
Cette pandémie du siècle a montré au grand jour les difficultés qui
fragilisent le secteur éducation/formation. Cela se traduit concrètement par la
fermeture de tous les établissements préscolaires, primaires, secondaires et
supérieurs. Les écoles privées ont enregistré les plus grandes perturbations
liées à la mise en chômage technique du personnel enseignant, au manque de
trésorerie, au paiement des salaires. Par exemple, au niveau de l’enseignement supérieur privé il y a un cumul de
créance de 80 milliards au dernier trimestre 2019. Dans cette période difficile
de crise sanitaire, la plupart des Cabinets de formation sont en arrêt
d’activités étant donné que leurs clients que sont les PME/PMI et les grandes
entreprises ont mis de côté l’exécution des plans de formations 2020, au profit
de la bataille du plan de continuité d’activités, de sauvetage des emplois et
de survie du core business.
En conclusion, il faut noter que cette analyse contributive
est une alerte pour inciter les bonnes volontés et les pouvoirs publics à
prendre toutes les dispositions idoines pour appuyer les entreprises
financièrement, matériellement, socialement et juridiquement afin d’anticiper
la crise de l’emploi.
Vous pouvez partager cette publication!