26-04-2025
Avis d'experts

Répétiteur : Métier en mal de reconnaissance

Le répétiteur est devenu le recours quasi systématique de presque tous les parents d’élèves, quel que soit leur revenu ou leur niveau d’études. Cette forte demande des “maîtres de maison’’ a donné des idées à certains. Des structures d’encadrement scolaire à domicile se sont ainsi constituées au fil des années pour faire face à l’exigence de professionnalisme des parents d’élèves. Coup de projecteur sur les “pro’’ des cours à domicile.

Habituellement, ce sont des lycéens ou de jeunes étudiants dans le voisinage, sans grande expérience ni pédagogie, qui s’évertuent comme ils peuvent à encadrer leurs cadets du primaire ou du secondaire contre petite une rémunération (argent de poche). Cette habitude, si elle est encore répandue dans des zones d’habitation populaires et moins nanties comme par exemple Abobo, Adjamé ou Yopougon, tend à disparaître au profit de structures qui se veulent professionnelles. Certaines, décomplexées, se donnent de la visibilité comme de vraies écoles. 2KP, AECD (Agence pour l’encadrement des élèves et enseignements par les cours à domicile), Leboileau, Encadremax...

Avec des structures comme celles-là, les cours à domicile sont devenus un métier à part entière, mais en quête de reconnaissance. Le défi de la professionnalisation Comme toutes les PME qui ont l’un ou les deux pieds dans la modernité, les structures d’encadrement scolaire à domicile misent, elles aussi, sur la qualité de la ressource humaine. Un cabinet comme 2KPI compterait, selon M. Yapo Christian, son Directeur général, 50 enseignants expérimentés sous contrat sur une base de données de 100. Contrairement aux répétiteurs particuliers qui ne sont soumis à aucun contrat vis à-vis de leurs employeurs. Quant aux salaires, ils varieraient entre 70 et 150.000 FCFA au minimum et évoluerait en fonction du nombre d’enfants ; c’est-à-dire mieux que ceux payés dans des écoles privées de la place. M. Doukouré Joseph, DG de Leboileau, met un point d’honneur sur l’importance du suivi-évaluation des prestations des enseignants, précisant que tout professeur opérant au sein de sa structure, « se doit de rendre compte ». Il souligne également qu’afin d’assurer la continuité du cours, des mesures d’urgence ont été prévues en cas d’absence avérée d’un professeur : « Nous le remplaçons par un autre enseignant du même rang académique.

Nous nous évertuons à professionnaliser le métier de maître de maison afin que tout le monde sache que c’est un métier comme tout autre ». C’est ainsi, selon lui, que les résultats escomptés par les parents seront effectivement obtenus. Mais le défi majeur auxquelles ces entreprises restent confrontées, c’est celui de la reconnaissance de l’Etat. En effet, celles-ci, quelle que soit leur taille ou leur dynamisme, ne bénéficient d’aucun statut auprès du Ministère de l’Education nationale. Reconnaissance qu’elles revendiquent au vu de l’importante mission qu’elles accompliraient. Relais de l’Etat et des parents A la question de savoir la pléthore de structures d’encadrement scolaire résulte de la défaillance du système éducatif national, Lida Henri-Pascal Gnako, Directeur de AECD SARL, répond oui, tout de go « Si nous avons créé l’AECD, dit-il, c’est parce que le système est défaillant. Bien- sûr que le gouvernement de son côté essaie de faire des efforts avec la construction d’écoles et la formation d’enseignants mais dans le contexte actuel, la présence d’un répétiteur est nécessaire parce que nos classes sont en surnombre. Par exemple au Lycée Pierre Gadié de Yopougon, on trouve une classe de terminale avec un effectif de plus de 80 élèves. Il y a même des classes de 90 élèves pour le premier cycle. Le professeur qui a seulement une heure ou deux heures de cours, ne peut pas, à lui seul, répondre aux exigences de tous ces élèves ». Voilà un argument difficile à contredire ! Yapo Christian, DG du groupe 2KP, évoque, quant à lui, la défaillance des parents. Selon lui, « les parents n’ont plus le temps de s’occuper de leurs enfants. Auparavant, nos mères étaient en mesure de faire le suivi parce que ne travaillant pas dans le public ou au privé. Mais vu les contraintes de la vie actuelle, il n’y a presque personne à la maison pour s’occuper des enfants à part peut-être la nounou. Il y a donc un vide à ce niveau que seul un répétiteur peut combler ».

Un autre argument massue ! Certains acteurs de ce secteur n’hésitent pas à dire que « les répétiteurs participeraient à environ 60% à la réussite scolaire des élèves si l’encadrement est bien fait par ces derniers ». Cela reste, bien sûr, à Rattrapage sans f vérifier. Mais il ne fait aucun doute qu’un cours à domicile administré dans les règles de l’art peut être d’un concours important pour les élèves. Par ailleurs, ces structures qui officient “au noir’’ contribuent à donner une activité rémunératrice aux personnes en quête d’un job à la hauteur de leur diplôme. Aider à mieux professionnaliser cette activité, mettrait probablement tous les parents à l’abri de risques divers comme les fausses qualifications, la moralité douteuse (vols, viols, informateurs de bandits…). Un parent interrogé dans le cadre de ce dossier a révélé avec beaucoup d’amertume que le répétiteur de ses enfants est l’auteur de la grossesse de sa fille de 4ème.

 

Arsène DIOMANDE