
De plus en plus des conjoints
se voient proposer des postes à l’étranger. Quel dilemme pour les couples !
Partir avec son ou sa conjoint(e) ou opter pour le développement séparé ? Quels
réseaux activer pour trouver du travail au conjoint « suiveur » ? L’expatriation
à deux, à quelles conditions ? « Parlons budget familial » est allé recueillir
les témoignages de quelques couples. Le bilan est aussi psycho-affectif que
financier.
« Communiquer quotidiennement… »
« Six mille Km nous séparent mais
nous n’en n’avons pratiquement pas conscience ! Il ne se passe pas un jour sans
que nous ne communiquions. C’est notre règle à nous ! » Ainsi se présente le
quotidien du couple Konaté dont la femme vit et travaille en France depuis deux
(02) ans maintenant. Le disant, M. Konaté TITI, Responsable d’une petite unité
industrielle, se veut être néanmoins très objectif : « Je ne dis pas que
cette situation est facile ou agréable à vivre. Ce fut d’ailleurs très
difficile pour moi d’accepter de la voir partir loin du cocon familial. Mais
dans le même temps c’était une décision de sa famille… » Et Mme Konaté Berthe
de renchérir : « Moi-même, il m’a été difficile d’abord de prendre la décision
de partir et ensuite de convaincre mon époux de me laisser tenter l’aventure.
La perte de mon boulot à Abidjan ici a été pour beaucoup dans ma décision
finale de partir vers l’hexagone ».
Aujourd’hui, « grâce à la
communication », M. et Mme Konaté ont non seulement trouvé un terrain d’entente
mais mieux, ils se sont accommodés de leur nouvelle vie. « On s’est parlé en
mettant au-devant nos intérêts supérieurs et on s’est compris : il ne se passe
pas un jour sans qu’elle ne m’appelle de son poste fixe à la maison à sa
descente du travail. On communique donc beaucoup. On peut même se voir et se
parler grâce aux nouvelles Tics. De plus, elle est là chaque fin d’année… », se
réconforte M. Konaté. Cependant lorsque vous évoquez une éventuelle
expatriation de la famille, leur réponse est unanime et sans équivoque : «
Impossible de laisser mes affaires pour aller à l’aventure ou pour aller
reconstruire. Même s’il existe des facilités… », nous assure l’homme. Quant à
l’épouse, elle avoue vouloir revenir auprès de sa famille : « Vivre loin de ma
famille me déprime et l’aventure n’a pas été aussi enrichissante que cela.
C’est pourquoi, je prépare mon retour définitif auprès de mon mari et de nos
deux filles ». « Cela a failli me coûter mon homme ! » Il existe des couples
qui veulent tout. Réussir au niveau professionnel en s’investissant dans une
carrière épanouie sante, ascendante et parfois même internationale. Mais en
même temps, ils veulent aussi construire une vie familiale la plus équilibrée
possible. Ce challenge, le couple Agbachi s’y est essayé et y a laissé beaucoup
d’énergie. « A l’époque nous n’étions que fiancés, moi travaillant pour une
banque de la place, quand ma fiancée venait de décrocher un poste de chargée de
mission dans une institution internationale. Evidemment c’était avec beaucoup
de joie qu’on a accueilli cette promotion mais le revers de la médaille allait
s’avérer bien difficile à digérer », annonce d’entrée M. René Agbachi. « La
fougue de la jeunesse, l’excitation d’un premier vrai poste et surtout l’envie
de réussir, vont nous faire perdre de vue l’essentiel dans une relation de
couple. J’étais toujours entre deux avions (Pa ris-Bruxelles et vice versa) ;
il arrivait que je passe des journées (2 ou 3 jours) sans appeler mon fiancé et
j’oubliais parfois aussi de le rappeler quand je manquais ses appels »,
confesse de son côté Mme Agbachi Gertrude. Cette “rupture’’, a été mal vécue
par son époux. Ce dernier, après avoir entrepris des démarches auprès de sa
belle-famille et des amies de sa fiancée pour l’amener à changer d’attitude, a
fini par capituler : « J’avais fini par me convaincre que ma fiancée cherchait
à se caser ailleurs et que je ne comptais plus dans sa vie… Nous avons fait pratiquement
4 ans sans se voir, c’était une séparation totale de corps, mieux, je dirai
d’esprit », se remémore-t-il. Gertrude reconnait que la situation était sur le
point de leur échapper : « J’avoue que je n’avais qu’un seul objectif, c’était
même une obsession : mener à bien ma mission ! Seulement, je n’en avais pas
parlé à mon fiancé, je l’ai laissé avec ses doutes et ses inquiétudes. Et donc
durant cette période, je me consacrais exclusivement à mon boulot. Je n’ai
connu aucun autre homme durant cette période comme le pensait mon époux, une assurance
que lui ne peut me donner (rire ensemble) ». L’ayant dit, Mme Agbachi confie
que le manque de communication a failli tout gâcher. « Mais heureusement
l’amour que nous nous portons a été au-dessus de tout. Après m’être imposée par
mon travail, j’ai obtenu l’affectation demandée. Je suis maintenant basée à
Abidjan auprès de ma famille ». Depuis novembre 2015, René et Gertrude sont
unis par les liens sacrés du mariage et attendent leur premier enfant.
« Elle m’a dit : “… On ne partage
pas la misère !” »
Homme de principe et de
conviction, M. Koffi Yemlin est de ceux qui pensent « qu’aller dans les pays
occidentaux n’est pas une finalité et qu’on peut rester dans son pays
(d’origine) et se réaliser ». « Dans les années 90, je travaillais déjà lorsque
ma fiancée qui était allée au Canada a décroché un poste à la Banque Mondiale
avec résidence Washington, siège de l’institution. Elle m’a tout de suite pro
posé de la rejoindre. Mais dans le même temps je venais aussi d’obtenir un
nouvel emploi dans une institution internationale et c’était un poste très
honorable puisque j’ai été le seul retenu sur une liste de près de cent
postulants. Alors il m’était devenu très difficile d’abandonner un poste si
chèrement acquis pour aller la re joindre », nous raconte-t-il. Néanmoins,
soucieux du devenir de son couple, M. Yemlin va proposer à sa dulcinée de lui
permettre de faire, pendant 1 an ou 2, ses classes dans cette institution de
classe mondiale et avoir ainsi un bagage tech nique, intellectuel (maîtrise de
l’anglais et de l’informatique) afin de mieux se valo riser aux USA. « Malgré
les visites dans les deux sens, elle a insisté pour que j’abandonne tout pour
la rejoindre dans un bref délai au pays de l’Oncle Sam. Elle faisait l’objet
d’une cour assidue là-bas. Cela m’effrayait évidemment. Mais moi, je ne
l’entendais pas de cette oreille. Et c’est dans cette atmosphère de bras de
fer, que nous avons prononcé la fin de notre relation un jour à 3h du matin
(décalage horaire). « Tu viens ou c’est fini entre nous ! Sache qu’on ne
partage pas la misère », m’avait-elle alors assené », se souvient, avec un
sourire un peu figé notre sexagénaire. « Mais c’était tout de même un vrai
dilemme ! Partir, aurait été un acte d’amour et non par choix de vivre un
certain idéal américain. Je l’aurais re jointe plus tard si elle avait été
patiente parce que j’avais aussi une carrière à gérer, et ça, elle ne l’a pas
mis dans la balance. Mais bon ! Chacun s’est marié de son côté et nous sommes
restés de très bons amis », a-t-il précisé. M. Koffi Yemlin croit cependant
qu’autant l’expatriation à deux est possible, autant vivre séparément en
suivant chacun sa carrière est faisable : « Ce sont des situations qui sont
normalement connues et donc prévues par l’employeur (les institutions
internationales et les ambassades surtout) qui essayent de trouver des
solutions arrangées pour ne pas faire de victimes et donc baisser la qualité du
travail de leurs employés. Parce que quoiqu’il en soit, on travaille pour la
famille », a-t-il conclu.