Les Ivoiriens travaillent-ils suffisamment ? L’interrogation semble volatile et la réponse qui n’en est pas moins aisée, peut paraître prétentieuse à certains égards. Car les repères objectifs, comme le nombre d’heures de travail quotidien en moyenne par personne, le taux d’absentéisme et de retard, sont quasi inexistants en Côte d’Ivoire. Quant à la productivité qui pourrait permettre d’en juger, en dehors de quelques secteurs clés, comme les régies IRH Mag N° 007 Juillet - Août 2015 financières, difficile d’estimer. A l’heure où l’émergence est sur toutes les lèvres, n’est il pas opportun de savoir avec quel type de travailleur le développement se fera ? Dans le fond, le sous-développement n’est-il pas en lui-même la manifestation d’un travail insuffisant ou mal orienté ? Le travail, maximal ou optimal, ne se justifie t-il pas par les résultats, le sentiment de satisfaction dans une parfaite relation client / prestataire ? En somme, par le progrès et la création de richesses ? Comment les Ivoiriens perçoivent-ils le travail ? Et comment sont-ils au travail ? Récemment, un dirigeant d’entreprise expliquait que « quand un peuple travaille, les citoyens sont préoccupés par leur travail, il y a une volonté de rejoindre son poste. On sent une synergie des gens vers un but commun. Il y a la création de richesses. Les objectifs de l’Etat se multiplient. Le niveau de vie des populations se retrouve réhaussé. Le développement s’accélère ». En sommes-nous là ? Les 36 Ivoiriens sont-ils davantage préoccupés par leur travail ? Ont-ils la volonté de rejoindre leurs postes, même les matins pluvieux ? Y a-t-il convergence dans les efforts vers un but commun ? Toujours est il qu’en écoutant, l’opinion ou les préjugés veulent que l’Ivoirien ne travaille pas suffisamment ou travaille mal. Un directeur administratif et financier d’une PME expliquait à ce sujet, avoir la désagréable impression que ses collaborateurs étaient toujours fâchés de travailler, mais toujours heureux de percevoir leur salaire. Un tel sentiment se trouve d’ailleurs renforcé par des comportements qui ont fini par ternir l’image de marque de corporations entières et dont nous relevons quelques uns dans ce dossier de IRH Mag N°007. L’Ecrivain Français André Maurois dans son livre ‘’Un art de vivre’’ disait qu’ ‘’Un travail haché porte toujours la trace des interruptions’’ . Que de travail haché ! Désamour… Dans un commissariat de la place où s’est rendu récemment un ami pour établir un document administratif, une scène assez banale l’a interpellé. Il était en train de faire plastifier le document établi quand un policier, l’air ennuyé, est venu faire des photocopies. Le jeune homme qui s’occupe de cette tache dans l’enceinte du commissariat et qui n’est pas policier, s’est empressé de le saluer obséquieusement et de lui demander comment il va. L’agent a répondu d’une voix lasse et pleine de dégout: ‘’Mon petit, c’est toujours la même chose avec ce boulot de merde ! ». Sur le champ, il n’a pas réagi à cette réponse. D’ailleurs, ce n’était pas la première fois que l’on entendait quelqu’un proférer de gros mots contre le métier qu’il exerce. Mais c’est la remarque du jeune opérateur sur photocopieur qui donne matière à réflexion, une fois que le flic a tourné les talons. « Le monde est bizarre quoi ! Quand les gens n’ont pas de travail, il passe tout leur temps à se plaindre et ils en veulent au monde entier ; ils dorment même dans église pour implorer Dieu. Mais quand ils ont un travail, ils passent tout le temps à le maudire. Toi, tu es policier, tu te plains comme ça ; et nous qui sommes au chômage, on va dire quoi alors ?». Cette observation du jeune homme nous a éclairé sur un fait : cette manie des Ivoiriens de se plaindre sans cesse de leur boulot. c’est à se demander si cette attitude désinvolte envers l’activité qui nous permet de payer le loyer et le sac de riz n’était pas symptomatique d’une certaine forme de désaffection pour le travail en général. Des «corps habillés» Ces gardiens du temple, minés par des complexes aux origines incertaines, ont développé des réflexes difficiles à leur ôter. Ils intimident et rackettent de moins en moins à visage découvert mais toujours activement. ‘’Sergent deux togo’’du célèbre hebdomadaire satirique Gbich, n’est pas mort ; il rempile… « Les parents payent pour faire réussir leurs enfants aux concours. Ceux-ci doivent rentabiliser. Ce qui explique que malgré les appels au professionnalisme et les campagnes de sensibilisation sur l’éthique, des corps habillés continuent de profiter de la moindre occasion pour extorquer des fonds aux populations. Formé pour protéger les populations, le corps habillé ivoirien n’est pas toujours rassurant», soutient J.M, rédacteur en chef d’un quotidien d’informations générales de la place. Conséquences, des protecteurs de la cité, déloyaux et cupides, font planer une menace existentielle sur le pays et sur leurs concitoyens.
Au cœur de l'entreprise
Travailleurs Ivoiriens : Fâchés de travailler, Contents d’être payés
- Par auteur
- 14-03-2025
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