M. le Ministre, quelle est votre analyse de l’importance des RH aujourd’hui au sein de nos organisations ?
De nos jours, on s’accorde unanimement
à dire que
les ressources humaines font la force des
organisations. Toutes
les études le prouvent, plus on place l'homme au cœur de l'organisation, plus elle est performante.
Vous pouvez avoir
un projet bien
ficelé, des ressources financières et matérielles disponibles mais, si vous n’avez pas
les compétences
ni les talents adaptés pour mettre tout cela en musique, ce sera peine perdue.
Je pense que nos
organisations africaines
ont d’importants besoins en ressources humaines de
qualité. Les universités et
autres établissements de formation dans nos pays
francophones dispensent
encore, malheureusement, beaucoup de théories qui ne sont en adéquation ni avec nos potentiels de
développement,
ni avec les besoins réels du marché de
l’emploi. Il faut
trouver un maillon entre
les jeunes qui sortent des centres de formation et le marché du travail pour les « capaciter », vous
me permettrez ce
terme qui n’existe pas en français (rire). Je souhaite
ici mettre en lumière le caractère indispensable
du renforcement
de leurs capacités afin de les rendre plus opérationnels sur le marché de l’emploi.
Ici au Togo par
exemple, nous avons de
nombreux instituts de
formation, des universités privées, etc.
qui se créent
et dont le contenu de la formation doit davantage et continuellement s’adapter aux réalités du monde
professionnel.
Je
crois donc que nous avons pour obligation
de nous organiser afin de mieux
envisager la préparation des jeunes
des pays de la sous-région et du continent africain
face aux réalités
de ce monde global. En effet, tout ne s’apprend pas nécessairement à l’école ou à l’université, et ça les
anglo-saxons l’ont
très bien compris !
Seriez-vous prêt à
accompagner des
initiatives qui tendent à valoriser nos RH ?
Absolument ! C’est évidemment important d’encourager et d’accompagner toutes les initiatives, dans l’ordre de la formation, du renforcement des capacités et de la transformation des ressources humaines, qui peuvent permettre aux Hommes d’être davantage utiles à leur pays. Je voudrais à ce sujet, vous rappeler que la problématique des ressources humaines est un axe prioritaire du gouvernement. C’est d’ailleurs une question qui a été abordée lors du récent séminaire gouvernemental et sera à l’ordre du jour du prochain.
Au vu de vos
enjeux de performance
économique, quelles sont les mesures qui ont été prises pour développer le capital humain ?
La première mesure que nous avons prise
a été
une réorientation de notre
système éducatif. Nous nous sommes
rendu compte que les filières
traditionnelles de formation, notamment
dans les établissements de
formation et les universités, ne préparent
pas suffisamment à
la vie active ; elles ne
reflètent pas assez les
attentes des acteurs de l’économie, les réels besoins ainsi que notre potentiel en matière de production,
de croissance
et de prospérité.
Nous avons donc opté
pour la création
d’instituts de formation en alternance pour le
développement. Ce, à
l’effet de
former davantage les ressources humaines
en fonction des
besoins de
l’économie togolaise par secteur d’activité. Au même moment, nous avons
engagé une réforme de notre système universitaire
pour qu’il puisse
s’adapter aux métiers d’avenir. C’est très important d’aller dans ce sens sinon nos étudiants seront très
vite en déphasage
avec leurs connaissances.
Dans
un second temps, nous avons pensé
le renforcement et la réforme de
l’Agence Nationale Pour l’Emploi (ANPE). Nous voulons que
cette agence devienne
une structure d’adaptation et de renforcement des capacités des jeunes diplômés vers des
secteurs porteurs. Il
y a donc un vaste programme qui sera conçu et mis en œuvre dans le cadre de
l’ANPE. Naturellement, il faudra
aussi mobiliser
le secteur privé dans la mise en œuvre de ce nouveau dispositif. Nous avons, pour cela, reformé le
Code du travail
où les stages et l’apprentissage occupent un volet
important notamment à travers les exonérations
de cotisations
sociales pour encourager les entreprises œuvrant dans les différents secteurs de
l’économie à prendre
plus de stagiaires
sans avoir peur des implications fiscales et sociales. Ce sont là autant d’initiatives qui concourent à bâtir des
ressources
humaines de qualité, compétentes au service du développement et répondant à nos ambitions de
croissance continue.
Pouvons-nous conclure qu’il y
a un début
de corrélation entre les enjeux
de développement du Togo et le niveau
d’accompagnement pour
la transformation des
ressources humaines ?
Nos ambitions étant extrêmement élevées,
nous pensons que nous ne sommes même pas encore à
la moitié de
ce que nous envisageons en termes de réformes et d’innovations pour nous assurer que nous
disposons d’un Capital
Humain répondant à nos exigences.
Nous
évoluons dans un contexte où la Fonction publique,
dans nos pays,
ne peut plus, à elle seule, absorber les produits de nos universités et grandes écoles. Nous devons donc
miser sur le
secteur privé qui a besoin de ressources humaines plus adaptables. Nous devons pour cela nous assurer
que les filières
de formation de base sont assez solides, répondent aux besoins des entreprises et donnent des outils
pour que les jeunes
soient en mesure de se battre et s’adapter aux métiers actuels et d’avenir.
La COVID a
foncièrement changé les
habitudes et le mode de travail avec l’arrivée de nouvelles formes de travail notamment le télétravail
ou le travail
hybride.
Comment les entreprises au Togo sont-elles parvenues
à faire face
à cette situation ?
Nos pays africains
y compris le Togo n’ont
pas suffisamment développé le travail à distance mais à la survenue de la crise de la Covid-19, tous ont
compris qu’il fallait
s’adapter à de nouvelles méthodes de ravail. A ce jour, notre pays dispose d’un dispositif normatif du
Code du travail
qui consacre désormais formellement le télétravail et définit les obligations des parties prenantes en la
matière. Avant
même cela, dès l’avènement de la crise à Covid-19, un accord a été trouvé à travers la concertation
et le dialogue
entre le Gouvernement et les acteurs de l’économie, notamment le Conseil national du Patronat, la
Chambre de
commerce et d’industrie et l’Association des grandes
entreprises du Togo,
permettant aux
entreprises de prendre
des mesures pratiques pour faciliter la continuité des activités. Il était évident que
nos pays ne pouvaient pas se permettre de mettre
certains secteurs
d’activités en veilleuse. Il a fallu être ingénieux et souples pour permettre aux entreprises et aux
travailleurs de revoir
les modalités de travail dans la mesure du possible.
Aujourd’hui, nous essayons de développer davantage cette nouvelle manière de travailler
même si cela signifie
qu’il va falloir se doter d’infrastructures, d’équipements numériques et de fluidité de
la connectivité. Vous ne pouvez pas, par exemple,
demander de faire
du télétravail et avoir une connexion Internet qui n’est pas adaptée (rire). Nous allons continuer à nous
améliorer tout
en sachant que certains de nos secteurs d’activité sont encore traditionnels et ne se prêtent pas au
télétravail